GIORGIONE le « porteur de feu »
Sur la terre, nul destin de poète n’est comparable au sien. De lui tout reste ignoré ;quelques-uns sont allés jusqu’à nier son existence . Son nom n’est inscrit sur aucune oeuvre certaine. Cependant, tout l’art vénitien est enflammé par sa révélation ; c’est de lui que TITIEN a reçu le secret d’infuser un sang lumineux dans les veines de ses créatures. Ce que GIORGIONE représente dans l’art, c’est l’épiphanie du feu. Il mérite qu’on l’appelle le « porteur de feu » à l’égal de Prométhée. »
Gabriele d’ANNUNZIO
À Castelfranco, dans le terroir de Trévise, en l'an 1477/78 … »
C’est par VASARI que nous savons quelque chose- très peu de chose en fait - de la vie et de l’oeuvre de Giorgio BARBARELLI , detto il Giorgione.
Fils naturel d'une paysanne et d'un patricien de la famille BARBARELLI. Élevé au milieu d ‘une nature majestueuse (dont manifestement il a su s’ imprégner) , et dans le voisinage de l’ élégante cour de Catarina CORNARO , reine de Chypre détrônée.
Vie familiale modeste et certainement laborieuse jusqu’à ce qu’on le retrouve à Venise dans l’atelier de Giovanni BELLINI où il a pour condisciple TITIEN, dont il deviendra par la suite le second maître.
À Venise il se distingue , non seulement par son génie précoce, mais aussi par sa beauté, sa force, sa distinction et son élégance, qui lui valent bientôt ce surnom de GIORGIONE , le beau Giorgio.
À Venise il se distingue , non seulement par son génie précoce, mais aussi par sa beauté, sa force, sa distinction et son élégance, qui lui valent bientôt ce surnom de GIORGIONE , le beau Giorgio.
D'abord, il peint des fresques, ou plutôt des peintures à l'huile sur le mur, au palais SORANZO, sur le campo San Paolo, au palais Andrea LOREDANO (plus tard palais GRIMANI) , à la Cà FLANGINI (près de Santa Maria Zobenigo ); toutes œuvres exécutées par un procédé malheureusement éphémère.
En 1507, il est mentionné qu’il doit exécuter une grande composition pour le Palais des Doges. On ne sait s’il l’acheva et de toute façon peut être a-t-elle été détruite dans l’incendie de 1577.
C’est par l’entremise de BELLINI, artiste officiel de la ville que les puissants marchands allemands établis à Venise confient à GIORGIONE, déjà célèbre à trente ans, et à son jeune apprenti de vingt ans, la peinture à fresques d’une série d’allégories sur les vastes panneaux de leur fondaco. En 1508, il travaille donc aux fresques du Fondaco dei Tedeschi, avec le jeune TITIEN: parmi les quelques fragments qui nous sont parvenus, on pense pouvoir lui attribuer celui qui représente « Une jeune femme nue » (Venise, Galerie de l'Académie).
L'homme de lettres vénitien Marcantonio MICHIEL qui écrit dans les années 1520, signale que le peintre est très lié aux principaux cercles intellectuels et humanistes de son époque dont celui du poète BEMBO.
Une série d' oeuvres du maître se retrouve dans les maisons de nobles vénitiens . Ainsi en est-il du tableau « Les trois philosophes » qu’il peint pour son ami Taddeo CONTARINI .
De toutes les œuvres de GIORGIONE, celle qui est de loin la plus inspiratrice de commentaires c’est « La tempête » dont nous connaissons le nom du commanditaire privé : Gabriele VENDRAMIN. Nous savons que le tableau prend place dans le palais du vivant de son auteur.
GIORGIONE
« Doué d’une nature fiévreuse et passionnée », il lui fallait, si l’on se fie au texte ancien, «les courses folles dans la nuit, les romances sous les balcons, enfin, une vie d’émotions et de désordres » Peintre inspiré, musicien talentueux et bel homme, il possède tout pour plaire aux femmes . Cependant, « après des nuits passées dans l’ivresse », le séducteur comblé ne l’emporte jamais sur l’artiste que l’on trouve toujours ardent au travail et plein de fougue. Il va de soi que, pendant son bref et fulgurant passage sur cette terre, ce GIORGIONE-là a produit en se jouant, et par centaines, portraits et compositions profanes ou sacrées.
Des experts sont parvenus à lui retirer maints tableaux dont il passait pour être l’auteur. De sorte que si l’on tient ces exclusions pour valables, on doit admettre qu’une seule et unique œuvre due incontestablement à la main de GIORGIONE nous est parvenue : à savoir La Vierge trônant entre Saint Libéral et saint François, retable peint en 1504, et qui orne depuis lors une chapelle du Duomo, à Castelfranco.(*)
Que des œuvres de GIORGIONE ne soient pas venues jusqu’à nous, que d ‘autres ne nous soient connues que par des copies ou des pastiches, que d ‘autres enfin, non achevées par lui l’aient été par tel ou tel de ses émules ou élèves est fort probable ; et fort probable aussi le bien fondé de certaines changements d’attributions, il n’en reste pas moins que dans ces œuvres là, le monde plastique créé et animé par GIORGIONE s’impose d’emblée aux yeux et au sentiment.
Il nous suffit, à nous, de constater qu’aucune des œuvres ainsi retranchées ne serait ce qu’elle est si GIORGIONE n’avait pas existé
Dans la longue histoire des arts, peu de maîtres ont possédé au même degré que GIORGIONE- avec cette souveraine et incorruptible poétique innocence- le pouvoir de transposer en rêveries de l’esprit, les émotions des sens ! Lorsque ses premières œuvres apparaissent aux peintres de son temps, elles rencontrent le succès réservé aux œuvres qui réveillent la conscience d’un besoin… et qui sont assez belles pour le satisfaire!
« À Castelfranco, dans le terroir de Trévise, en l'an 1510 … »
Cité déjà par ses contemporains comme un des plus grands artistes de son époque, GIORGIONE nous a laissé en lisière de sa vie. Une vie si mystérieuse et une œuvre si énigmatique qu’elles font de ce jeune homme mort à trente-trois ans un personnage légendaire.
« Col tempo »…
GIORGIONE de CASTELFRANCO, le « porteur de feu « est certainement le peintre le plus mystérieux de l’histoire de la peinture. Et un véritable météore !
Passionnant autant que passionné, intensément vivant et vivant autant que la vie le lui permet ,il touche à l’apogée de sa gloire quand une mort par audace, un amour à son dernier souffle, ajoute ce poète du bonheur précieux à la liste de tous ceux dont la beauté se moque à jamais des outrages du temps.
Passionnant autant que passionné, intensément vivant et vivant autant que la vie le lui permet ,il touche à l’apogée de sa gloire quand une mort par audace, un amour à son dernier souffle, ajoute ce poète du bonheur précieux à la liste de tous ceux dont la beauté se moque à jamais des outrages du temps.
Danielle T.
(*) Une de ses œuvres ( Laura – Vienne) porte au dos une inscription avec la date 1506
(*)Une autre date au dos de « Portrait de Terris » ( San Diego) est fragmentaire et ne peut être déchiffrée avec certitude.
La vecchia, Gallerie dell’ Accademia, (1506)
La tempesta, Venise, Gallerie dell'Accademia, 1507 - 1508
Texte écrit pour les dossiers du Campiello (clic)
Je vous recommande la lecture de "Les mémoires de Giorgione" de Claude CHEVREUIL .
Plein de rebondissements. Tout au long de ma lecture, j'ai eu besoin de revoir les tableaux de tel ou tel peintre compagnon ou non de Giorgione. C'est un livre passionnée et passionnant et qui plus est, paru dans la collection " Le Livre de Poche".
Un maître achat !
Dans son dernier billet, Danielle (des Merveilles ) nous parle de ce tableau avec beaucoup de sensibilité.
un pittore ed un uomo veramente speciale!
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RépondreSupprimerMerci pour ces éléments de la biographie de Giorgione. Il s'agit là d'une très intéressante publication.
RépondreSupprimerBonne journée!
Anne
J'aime ce que tu viens d'écrire, puisque j'ai vu que c'était signé de toi...j'aimerais avoir comme tu le dis si joliment "le pouvoir de transposer en rêveries de l'esprit, les émotions des sens" !
RépondreSupprimerbises
Danielle
Tu m'apprends beaucoup sur ce peintre dont j'ai découvert trois de ses toiles au palais Grimani de la Ruga Giuffa. J'en parlerai aussi, une autre fois!
RépondreSupprimerBonne soirée
merci Daniellre pour ce billet passionnant et merci aussi de ton petit clin d'oeil à mon petit post de spectatrice !
RépondreSupprimerBises du jour.
Ah mais vous avez eu la chance, vous, de voir l'expo sur Giorgione... ma fille Koka qui y était avant moi l'a beaucoup aimée et moi j'ai regretté de n'avoir "que" Piranèse à me mettre sous la dent !
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