Venise,
1515. Peu de villes auront connu autant d'injustices, de dangers, de
misère et de vices. De liberté, aussi.
Liberté
pour Mercurio, petit voleur des rues, as du déguisement, pour qui le
pavé romain est devenu trop brûlant. Liberté pour Giuditta, jeune
et belle Juive, dont la religion semble ici tolérée – mais pour
combien de temps ?
Rien
ne les vouait à s'aimer. Pourtant... Entre inquisiteurs et
courtisanes, palais, coupe-gorge et canaux putrides, les amants de
Venise feront mentir le destin...
J'ai refermé le livre avec regret car j' étais prête à les héros dans leur nouvelle aventure tant j'ai été captivée par leur histoire dans cette Venise qu'il faut imaginer , loin , très loin de l'image qu'elle nous propose aujourd'hui.D'aucuns trouveront sans doute quelques longueurs , trouvées au fil des pages ,mais cette Venise , toute en couleurs et odeurs, ne se dépeint pas en quelques coups de pinceaux, il faut planter le décor dans lequel évoluent les acteurs de cette prenante saga .
C'est un roman passionnant qui nous parle, et avec quel style, de l'histoire de Venise, des hiérarchies établies, de la vie quotidienne, des moeurs, des us et coutumes qui ne craignent rien.
Dès la première page , je me suis laissée emporter, partageant ma lecture afin de profiter le plus longtemps possible de ce livre éblouissant.
Que pourrais-je vous dire d'autre, sinon que je partage pleinement l'appréciation ci-dessous que Blandine nous a proposé , il y a un moment déjà.
Quel roman ! En fait, j'ai lu les 800 pages en 4 jours tant on est immergé, submergé par les images, les couleurs, les odeurs et les sons qui se mêlent dans la cacophonie d'une Venise mineur où grouille tout un peuple qui se presse et se bouscule dans le cœur battant de la Ville, à Rialto, à l'Arsenal avec la description superbe du montage d'une galée en une journée, dans le Castelletto des putains, dans le Ghetto des juifs qui vient de refermer ses lourdes portes, mais aussi à Mestre et dans la lagune.
Et dans ce tourbillon terrible et magnifique, brûle la haine des uns, brillent l'amour des autres, se relèvent ceux qui ont chuté, meurent les innocents et les coupables, par le fer ou par la maladie qui se répand après la bataille de Marignan.
Juste quelques extraits, pour vous donner l'ambiance.
" Isacco regarda en l'air. Quelques marches plus haut, une femme s'était évanouie contre la balustrade. Un morveux pissait contre le mur. C'était un va et vient constant d'hommes et de femmes qui riaient, juraient, crachaient, se palpaient sous les vêtements. Les uns se disputaient, certains se battaient, d'autres s'embrassaient, d'autres encore se courraient après. Cris et odeurs formaient une seule et même cacophonie.
La petite fille attendait, impatience, au dessus d'une marche couverte de vomissures.
- Bon Dieu, dit Isacco, mais où sommes-nous?
Donnola rit: C'est le Castelletto, docteur. Le quartier des putains.
- Bon Dieu, répéta Isacco "
"Le capitaine et les gardes se campèrent à l'entrée du pont pour lui barrer le route.
Dans leur dos, du côté du Ghetto, on entendit la voix de Giudetta.
- Pose les mains sur la porte, disait-elle.
Mercurio fixa Lanzafame et les deux gardes en haletant, le regard désespéré.
Alors, Lanzafame et les deux gardes, sans qu'il y ait besoin d'un ordre ou d'une parole, baissèrent les yeux et s'écartèrent.
Mercurio avança doucement. Il les dépassa d'un pas lent. Il atteignit la porte et posa les mains, paumes ouvertes, sur le bois de chêne.
- Je suis là, dit-il
- Je suis là dit Giudetta de l'autre côté de la porte. Et lentement, à son tour, elle posa les mains ouvertes sur le bois.
- Je te sens, dit Mercurio de l'autre côté.
-Je te sens, fit Giudetta en écho. "
"- Je vais le tuer, dit-il tout bas, d'une voix sombre.
Il entendit le vieux Zuan approcher.
- Ne te laisse pas prendre ton navire, lui dit-il
- C'est pour ça que je vais le tuer
- Ne le laisse pas te le prendre ... maintenant.
- Qu'est-ce que tu veux dire, vieil homme? demanda Mercurio, les yeux plissés comme deux fentes.
- Regarde comme tu es assis. Tu tournes le dos à ton bateau. A ton rêve. A ton espoir, fit Zuan. La haine te l'a déjà pris.
Mercurion eut la sensation d'être à la croisée des chemins. Il y avait une profonde vérité dans les paroles du vieux marin. C'était le moment de faire des choix. Et ces choix conditionneraient son avenir.
- Qu'est-ce que je dois faire, alors ? demanda-t-il, conscient de l'importance du moment.
Zuan le regarda en hochant le tête.
- Putain de bordel de misère, mon gars ! T'es con? s'exclama-t-il. Tourne-toi. Il suffit que tu changes de position et que tu te retournes. Ton bateau est là. "
Un roman dont je me souviendrais. Il y en a tant, sur Venise, que l'on oublie si vite !