"Après le repas, ils montaient en gondole, et s'en allaient voguer autour de l'île des Arméniens;c'est là, entre la ville et le Lido, entre le ciel et la mer, que je conseille au lecteur d'aller, par un beau clair de lune, faire l'amour à la vénitienne"
Illustration originale (clic)
""Alfred de Musset voyageait peu mais ne pouvait vivre ni écrire sans être amoureux.Aussi, croise-t-on dans l'histoire de sa vie plus de femmes que de villes.Venise, cependant, ville des lunes de miel et des rêveries, lui inspira une de ses plus charmantes nouvelles.L'expérience qu'il y fit avec George Sand évoque pourtant un grand drame passionnel...Avec Le fils du Titien, il transfigure véritablement cette pénible expérience.Non seulement ses héros s'aiment d'une passion exclusive et sans ombre, mais tout leur sourit: hasard, talent,richesse.publiée dans La revue des deux monde du 15 mai 1838, cette nouvelle apporte une réponse à la question qui préoccupait Musset: si l'on ne peut unir l'art et la vie, que faut-il sacrifier?Pippo, le fils de Titien, choisit délibérément de sacrifier l'art et voue ainsi sa vie à l'amour.""
Un chef d’œuvre naîtra cependant de cet amour. */**
Béatrix Donato fut le doux nom de celle
Dont la forme terrestre eut ce divin contour.
Dans sa blanche poitrine était un cœur fidèle,
Et dans son corps sans tache un esprit sans détour.
Le fils du Titien, pour la rendre immortelle,
Fit ce portrait, témoin d’un mutuel amour ;
Puis il cessa de peindre à compter de ce jour,
Ne voulant de sa main illustrer d’autre qu’elle.
Passant, qui que tu sois, si ton cœur sait aimer,
Regarde ma maîtresse avant de me blâmer,
Et dis si par hasard la tienne est aussi belle.
Vois donc combien c’est peu que la gloire ici-bas,
Puisque, tout beau qu’il est, ce portrait ne vaut pas,
(Crois-m’en sur ma parole) un baiser du modèle.
Dont la forme terrestre eut ce divin contour.
Dans sa blanche poitrine était un cœur fidèle,
Et dans son corps sans tache un esprit sans détour.
Le fils du Titien, pour la rendre immortelle,
Fit ce portrait, témoin d’un mutuel amour ;
Puis il cessa de peindre à compter de ce jour,
Ne voulant de sa main illustrer d’autre qu’elle.
Passant, qui que tu sois, si ton cœur sait aimer,
Regarde ma maîtresse avant de me blâmer,
Et dis si par hasard la tienne est aussi belle.
Vois donc combien c’est peu que la gloire ici-bas,
Puisque, tout beau qu’il est, ce portrait ne vaut pas,
(Crois-m’en sur ma parole) un baiser du modèle.
*. Ce tableau a réellement existé.On le sait grâce aux recherches d'un amateur célèbre.
**Le texte intégral de la nouvelle est disponible sur le net.
Les boni de l'édition papier :
*un avant-propos très finement écrit, signé Emilie CAPPELLA et
*un article éloquent ,signé Jules Barbey d'Aurevilly, publié dans Le Constitutionnel en 1877, (alors que Paul de Musset propose une biographie de son frère décédé 20 ans plus tôt):
" Hermine de pensée et de coeur jusqu'à sa dernière heure, qui mourut de ses taches encore plus que de ses blessures, pour qu'il fût bien et dûment puni d'avoir, étant hermine, cru qu'on peut se guérir de ses blessures en se roulant dans le ruisseau de feu du vice, comme le bison dans son bourbier"
* la biographie de Musset en suivant les dates importantes de sa vie.
Illustration de couverture: Santa maria della Salute, clair de lune à Venise
aquarelle de Sir Edward John POYNTER( 1836-1919)